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PRESS/77
25 septembre 1997
Inventer les routes commerciales de l'avenir: vers une 閏onomie sans fronti鑢es
On trouvera ci-apr鑣 le texte int間ral de l'allocution que prononcera M. Renato Ruggiero, Directeur g閚閞al de l'Organisation mondiale du commerce ?la Conf閞ence internationale sur la production industrielle (ICC), ?San Francisco, le lundi 29 septembre 1997.
Avant Christophe Colomb, les pays du monde 閠aient s閜ar閟 par les oc閍ns. Aujourd'hui, ceux-ci nous unissent. Des milliers de kilom鑤res de c鈈les ?fibres optiques tissent des liens entre les oc閍ns et les continents et il en va de m阭e des millions d'ondes sonores et de signaux 閘ectromagn閠iques qui s'entrecroisent au-dessus de la plan鑤e dans l'atmosph鑢e. Vingt-quatre heures sur 24, ce r閟eau plan閠aire transporte des contrats commerciaux, des transactions mon閠aires, des informations m閐icales, du mat閞iel 閐ucatif, et franchit instantan閙ent les fuseaux horaires, les fronti鑢es et les cultures. Les nouvelles routes commerciales des ann閑s 90 sont les rayons laser et les faisceaux de rayonnements de satellites. La cargaison ne se compose pas de soie ni d'閜ices, mais de technologie, d'information et d'id閑s.
Cette 閏onomie interconnect閑 est en train de transformer le monde d'une mani鑢e plus fondamentale que la seule mondialisation des marchandises et de l'investissement ne peut en donner l'id閑. Les technologies de l'information ont amen?une r関olution - dont les racines sont ici m阭e, dans les laboratoires de la Silicon Valley - qui a multipli?la circulation de l'information ?travers la plan鑤e, de sorte que le savoir est devenu un facteur de production plus important que le travail, le capital ou les mati鑢es premi鑢es. Cette r関olution va non seulement influer sur la croissance de la productivit?- elle va modeler de nouvelles relations entre les 閏onomies avanc閑s et les 閏onomies en d関eloppement, un nouveau contrat entre les gouvernements et les citoyens et de nouveaux liens entre les gens, qui transcenderont les cultures, les classes et les nationalit閟.
Nul ne peut pr閐ire avec certitude o?vont nous conduire ces changements structurels profonds. Ce qui est clair, c'est que cette nouvelle 閏onomie fond閑 sur l'information, d間ag閑 des nombreuses contraintes impos閑s par la distance, le temps et les ressources, a le potentiel d'ajouter une dimension nouvelle ?l'int間ration 閏onomique, une dimension "sans fronti鑢es" qui pourrait acc閘閞er de mani鑢e spectaculaire la croissance et la dynamique du d関eloppement dans une grande partie du monde. Il est clair aussi qu'un bon nombre de nos anciens outils politiques ne pourront plus servir dans cette 閏onomie sans fronti鑢es - et que les nouveaux instruments de la coop閞ation 閏onomique internationale, qui ignorent les fronti鑢es, comme l'OMC, prendront d'autant plus d'importance. C'est parce que nous entrons dans un monde nouveau et dans un nouveau type d'閏onomie - avec des avantages mais aussi des risques consid閞ables - que nous Inventons l'avenir.
II
Pour simplifier, l'閏onomie mondiale a travers?deux phases de d関eloppement au cours des 50 derni鑢es ann閑s, et elle s'engage dans une troisi鑝e phase, chacune nous rapprochant d'une 閏onomie globale plus int間r閑 et, dans certains secteurs, je dirais m阭e sans fronti鑢es.
L'閏onomie internationale. La meilleure d閒inition que l'on puisse donner des trois d閏ennies de l'apr鑣-guerre est peut-阾re celle d'une phase internationale de l'閏onomie mondiale - et j'entends par l?une 鑢e d'閏hanges croissants entre un ensemble d'閏onomies li閑s entre elles mais ayant encore un caract鑢e essentiellement national. En 1950, l'essentiel de l'activit?閏onomique se d閞oulait encore ?l'int閞ieur des fronti鑢es de l'Etat-nation - en fait, la part des 閏hanges dans la production globale 閠ait de 7 pour cent seulement. Le commerce international se limitait essentiellement aux mati鑢es premi鑢es ou aux produits finis, et l'investissement consistait principalement ?閠ablir des succursales 閠rang鑢es ("branch-plants") dans des 閏onomies nationales par ailleurs prot間閑s.
L'閏onomie mondialis閑. A partir des ann閑s 70, puis ?un rythme qui s'est acc閘閞? dans les ann閑s 80, l'閏onomie mondiale est entr閑 dans une deuxi鑝e phase de d関eloppement, que l'on appelle g閚閞alement aujourd'hui la phase de "mondialisation". Gr鈉e aux progr鑣 rapides des technologies de l'information et des communications, conjugu閟 ?l'abaissement syst閙atique des obstacles au commerce mondial, les entreprises ?dimensions mondiales ont pu fractionner le processus de production et en localiser les divers 閘閙ents sur diff閞ents march閟 r閜artis dans le monde. L'aspect le plus caract閞istique de la phase de mondialisation est la mont閑 de l'investissement 閠ranger. Le commerce n'est plus le seul ni m阭e le principal v閔icule servant ?livrer les produits et les services au-del?des fronti鑢es; l'investissement est devenu une force d'int間ration encore plus puissante, ?mesure que les soci閠閟 transnationales 閘argissent leur influence mondiale en 閠ablissant une pr閟ence directe sur les march閟 閠rangers. Les actifs cumul閟 de l'investissement 閠ranger ont tripl?depuis 1987 et d閜assent les 3 000 milliards de dollars EU, tandis que les ventes annuelles que ces actifs g閚鑢ent ont rattrap? et d閜ass?la valeur des 閏hanges mondiaux.
Mais le commerce se d関eloppe aussi avec la multiplication des transactions transfronti鑢es ?l'int閞ieur des groupes ou de leurs filiales, et avec l'閘argissement des 閏hanges ?toutes les phases du processus de production - depuis les composants et les services jusqu'aux 閠udes techniques. Les 閏hanges entre soci閠閟 d'un m阭e groupe transnational ou apparent閑s repr閟entent aujourd'hui environ les deux tiers du commerce mondial. La part du commerce en pourcentage de la production mondiale a plus que tripl? depuis 1950, passant de 7 ?plus de 22 pour cent. Aujourd'hui, les entreprises font du commerce pour investir et investissent pour faire du commerce, ?tel point que les deux activit閟 font de plus en plus partie d'une strat間ie unique, livrer des produits au-del?des fronti鑢es.
L'閏onomie sans fronti鑢es. Alors que les ann閑s 90 touchent ?leur fin, des signes nous annoncent que le processus d'int間ration prend une dimension nouvelle, avec les technologies num閞iques et les r閟eaux de communication qui rendent possible une 閏onomie de plus en plus affranchie des fronti鑢es dans les secteurs-cl閟. Au cours des dix derni鑢es ann閑s environ, le co鹴 des t閘閏ommunications et de l'informatique a connu une baisse spectaculaire, alors que leur rapidit?et leur capacit?augmentaient. Un appel t閘閜honique transatlantique co鹴e aujourd'hui 1,5 pour cent de ce qu'il co鹴ait il y a 60 ans. La Banque mondiale pr閐it que, d'ici ?l'an 2010, ce co鹴 aura encore diminu?des deux tiers, pour tomber ?3 cents la minute environ, c'est-?dire que les t閘閏ommunications transatlantiques seront presque gratuites. Le co鹴 de l'informatique a lui aussi connu une baisse spectaculaire, pr鑣 de 100 pour cent depuis 1960. Un seul transistor, qui se vendait 70 dollars EU au milieu des ann閑s 60, s'ach鑤e aujourd'hui pour moins d'un millioni鑝e de cent. Cela a permis de rendre l'informatique accessible ?des millions de gens ordinaires. En 1995, il s'est vendu environ 50 millions d'ordinateurs personnels dans le monde, contre 35 millions de voitures.
Ce qui symbolise le mieux cette 閏onomie de plus en plus lib閞閑 des fronti鑢es et fond閑 sur l'information est peut-阾re le r閟eau Internet. A la fois mondial et local, outil de communication et source de connaissances, Internet a vu sa taille doubler chaque ann閑 depuis sa cr閍tion voici un quart de si鑓le. On compte d閖?55 millions de personnes branch閑s sur le r閟eau Internet dans le monde; d'ici ?l'an 2000, leur nombre pourrait atteindre 550 millions, soit pr鑣 de 10 pour cent de la population mondiale. Mais Internet n'est pas le seul circuit disponible. D'autres technologies comme les march閟 financiers informatis閟, le courrier 閘ectronique, les op閞ations bancaires par t閘閜hone et l'閏hange 閘ectronique des donn閑s nous conduisent vers une 閏onomie ignorant de plus en plus les fronti鑢es, dont le moteur sera l'information.
Tout comme la mondialisation du commerce et de l'investissement ont modifi?profond閙ent l'industrie manufacturi鑢e depuis les ann閑s 80, l'av鑞ement d'une 閏onomie sans fronti鑢es pourrait transformer les services ou les branches d'activit?? caract鑢e intellectuel d'une mani鑢e tout aussi spectaculaire - ces activit閟, qui repr閟entent d閖?plus de 70 pour cent du PIB dans de nombreux pays de l'OCDE et jusqu'?50 pour cent dans certains pays en d関eloppement. Il y eut une 閜oque o?l'on consid閞ait que la plupart des services 閠aient par essence non n間ociables, puisque le "produit" 閠ait repr閟ent?par les personnes - leur force musculaire ou leur intelligence - et que l'exportation exigeait une pr閟ence mat閞ielle sur les march閟 閠rangers. Pour de nombreux services, ce dogme a compl鑤ement vol?en 閏lats avec l'invention de la puce 閘ectronique.
Aujourd'hui, tout service qui peut 阾re num閞is?et transmis 閘ectroniquement peut 阾re produit et livr?pratiquement n'importe o?dans le monde en l'espace de quelques secondes. Des centaines de milliers de consommateurs font d閖?leurs achats sur le r閟eau pour les livres, les journaux en ligne, les produits vid閛 et m阭e les voitures, en restant assis chez eux devant leur ordinateur. Mais l'impact le plus r関olutionnaire de l'閘ectronique se fera sur le commerce entre soci閠閟 d'un m阭e groupe ou interentreprises. Les logiciels, l'information m閐icale, les programmes 閐ucatifs, le traitement des donn閑s, les services juridiques et d'architecture, toutes ces branches d'activit?pourraient faire partie d'un environnement de plus en plus concurrentiel et affranchi des fronti鑢es, dans lequel chaque pays, chaque entreprise op鑢e sur un march?mondial virtuel.
III
Je voudrais seulement mentionner plusieurs 閘閙ents-cl閟 qui vont caract閞iser cette nouvelle 閏onomie sans fronti鑢es. Le premier est qu'elle ignore de plus en plus la g閛graphie, le temps et les fronti鑢es. Le commerce jusqu'? pr閟ent 閠ait fa鏾nn?par les r閍lit閟 de la g閛graphie, qui faisaient partie de l'avantage comparatif d'un pays. Aujourd'hui, dans des secteurs importants, les 閏hanges vont 阾re model閟 par l'absence de g閛graphie. Cette conqu阾e technologique du temps et de l'espace aura de profondes r閜ercussions 閏onomiques. Le co鹴 des transactions pour les consommateurs et les entreprises va chuter rapidement avec la contraction des nombreuses 閠apes qui interviennent entre acheteur et vendeur - distribution, vente, d閠ail. Quant ?la dur閑 des transactions, elle va diminuer encore plus vite, ajoutant toute une dimension nouvelle aux m閠hodes de production en flux tendu ou juste ? temps. Le plus significatif sera certainement l'abaissement des obstacles et des co鹴s ?l'entr閑 sur les march閟 - ou au d閙arrage d'une nouvelle affaire - qui permettra ?un plus grand nombre de fournisseurs de p閚閠rer sur un march? Non seulement les consommateurs vont b閚閒icier de cette comp閠ence accrue, mais les petites et moyennes entreprises, comme les soci閠閟 multinationales, vont d閟ormais jouer pleinement leur r鬺e sur le march?mondial.
Les fronti鑢es seront l'autre victime potentielle du commerce 閘ectronique. L'閏hange 閘ectronique de logiciels, de services ou d'information se fait aujourd'hui sur ce qui est quasiment un march?mondial unique, un march?qui se d閒init non par des produits, de la paperasserie et des contr鬺es ?la fronti鑢e, mais par des bits 閘ectroniques et des rayons laser. Il y a plusieurs ann閑s que Robert Reich a pos?la question de savoir ce que d閟igne le terme nous ?l'heure de l'int間ration globale. En d'autres termes, la nationalit?閏onomique aura-t-elle encore une importance dans un monde o?l'on ne pourra plus d閙阬er l'閏heveau de la valeur ajout閑 globale?
La question de Reich se pose encore davantage dans une 閏onomie num閞ique, qui fonctionne dans le cyberespace et n'a pas de r閍lit?physique, encore moins de nationalit? Par exemple, quelle est la nationalit?d'un progiciel dont la capacit?est augment閑 ? Delhi pour le compte d'une soci閠?situ閑 ?Seattle et qui est t閘閏harg?via Internet ?Beijing? Ce type de questions va dor閚avant se poser de plus en plus souvent, et les gouvernements devront d閒inir une strat間ie et des mesures touchant l'applicabilit?des r鑗les d'origine, les moyens de faire appliquer les r間lementations et les normes, le recouvrement de l'imp魌 sur les d閠aillants et consommateurs op閞ant dans le cyberespace.
La deuxi鑝e caract閞istique est que l'information devient de plus en plus une ressource d閏isive et le moteur essentiel du processus d'int間ration. L'information est aujourd'hui la cl?d'acc鑣 ?l'閏onomie mondiale. Tout comme la vague montante des 閏hanges et de l'investissement a 閠?la premi鑢e ?alimenter la mondialisation dans les ann閑s 80, c'est aujourd'hui l'acc鑣 ?la technologie, et la concurrence pour l'obtenir, qui mod鑜e l'閏onomie sans fronti鑢es. Cette diffusion de la technologie n'est 関idemment pas un processus nouveau - l'histoire du progr鑣 de l'homme au cours des si鑓les est en grande partie celle de la mise au point et de l'application g閚閞alis閑 des techniques. La nouveaut? c'est la mani鑢e dont un r閟eau grandissant d'ordinateurs, de t閘閜hones et de t閘閏opieurs est en train d'acc閘閞er le processus et d'en 閘argir la port閑. Cette 閏onomie qui a pour moteur l'information est fondamentalement diff閞ente de l'閏onomie traditionnelle fond閑 sur la terre, le travail et le capital. Elle n'est li閑 ?aucune r間ion, ?aucun pays. Elle est mobile. Elle peut se d関elopper n'importe o? car elle fait table rase de nombreuses caract閞istiques en fonction desquelles se d閒inissait le potentiel 閏onomique autrefois.
Cette 閏onomie tir閑 par le savoir n'est pas en train de prendre la place d'autres activit閟 閏onomiques; les usines et l'agriculture ne vont pas dispara顃re, les logiciels ne vont pas prendre la place de la nourriture que nous mangeons ni des voitures que nous conduisons. Mais la technologie est en train de modifier la mani鑢e dont nous produisons les choses, parfois de mani鑢e tout ?fait spectaculaire. Prenons m阭e la plus traditionnelle des activit閟 閏onomiques, l'agriculture, qui se pratique depuis l'aube de l'humanit? La m閏anisation, la biotechnologie, les transports et les technologies de l'information sont en train de transformer de fond en comble la production et la distribution agricoles, au point que l'agriculture moderne est parfois plus proche d'une activit?de service qu'elle ne l'est de l'agriculture traditionnelle. Et on peut dire que la m阭e transformation est en cours dans les industries extractives, la sylviculture, les transports et d'autres branches d'activit?
Il en r閟ulte un brouillage de nombreuses distinctions que l'on faisait autrefois entre le secteur manufacturier et les services, les produits et les proc閐閟, les 閏onomies dites de haute technologie et les 閏onomies fond閑s sur des industries ou des ressources plus traditionnelles. Mais le r閟ultat le plus important, c'est davantage de croissance et davantage d'emplois. Aux Etats-Unis, par exemple, les emplois dans le secteur des technologies de pointe ont repr閟ent?de 20 ?25 pour cent de la croissance des salaires et des revenus r閑ls en 1996. Du c魌?de la production, la part de ce secteur dans le PIB s'est chiffr閑 ?420 milliards de dollars en 1996, soit une augmentation de 15 pour cent par rapport ?1995.
Cela nous am鑞e ?une troisi鑝e caract閞istique: l'閏onomie sans fronti鑢es a le potentiel d'aplanir les relations entre les pays et les r間ions. Bill Gates a pr閐it l'av鑞ement de l'鑢e du capitalisme harmonieux, selon l'id閑 que la libert?et l'間alit?d'acc鑣 ?l'information va nous rapprocher plus que jamais auparavant d'un march?parfait. Je voudrais ajouter un autre potentiel, celui de donner une dimension nouvelle ?l'間alit?des chances. Au niveau individuel, les anciennes divisions entre capitalistes et travailleurs sont de plus en plus floues du fait que les gens ordinaires sont de plus en plus nombreux ?poss閐er les nouveaux moyens de production - c'est-?dire l'閐ucation, les comp閠ences et le savoir-faire n閏essaires pour diriger une 閏onomie avanc閑, dont le moteur est l'information. Et au niveau mondial les anciens clivages entre le Nord et le Sud laissent la place ?de nouvelles diff閞ences entre les pays qui adoptent la technologie et la mondialisation, et ceux qui restent en arri鑢e; ou, selon les termes employ閟 par Jean-Fran鏾is Rischard de la Banque mondiale, entre les pays qui suivent et ceux qui ne suivent pas, les pays qui apprennent et ceux qui restent immobiles, les pays branch閟 et les pays laiss閟-pour-compte, les pays fiables ?100 pour cent et ceux qui ne le sont pas.
Une 閏onomie mondiale de plus en plus branch閑 a le potentiel de r閐uire encore l'閏art qui s閜are les r間ions et les pays ayant d閖?eu acc鑣 ?la technologie et ?l'information, et les nombreux autres qui ne l'ont pas eu. L'acc鑣 aux t閘閏ommunications se d関eloppe rapidement; un milliard de personnes, soit pr鑣 d'un cinqui鑝e de l'humanit? auront acc鑣 au t閘閜hone au tournant du si鑓le, c'est-?dire que l'id閑 d'avoir un t閘閜hone dans chaque village va devenir r閍lit? Les programmes de lancement de satellites qui sont en cours actuellement, une douzaine environ, vont pratiquement 閘iminer les contraintes li閑s ? la largeur de bande et ram鑞eront le co鹴 des liaisons ?quelques dollars par station en l'espace d'une d閏ennie. De nombreux pays en d関eloppement pourront sauter des 閠apes enti鑢es du d関eloppement et entrer directement dans la toute derni鑢e g閚閞ation de la t閘閜honie sans fil - faisant ainsi l'閏onomie des 閚ormes d閜enses qu'implique la construction des infrastructures bas閑s sur le c鈈le en cuivre. Aujourd'hui, plus de 80 pour cent de la population mondiale ne peut pas t閘閜honer; bient魌, ces gens auront acc鑣 non seulement aux communications de pointe, mais aussi aux programmes 閐ucatifs, aux services m閐icaux et ?l'information technique que v閔iculent ces r閟eaux.
Il ne s'agit pas l?de pr閐ictions concernant un avenir lointain - ces mutations sont d閖?en cours. Nous les voyons aujourd'hui avec le d閜lacement significatif de la puissance 閏onomique vers le Sud et vers l'Est, d閜lacement qui aura ?l'閏helle mondiale des r閜ercussions politiques aussi spectaculaires que la chute du mur de Berlin. La Banque mondiale pr関oit un taux de croissance de 5 ?6 pour cent par an dans les pays en d関eloppement d'ici ?2020, cela veut dire que la part des pays en d関eloppement dans la production mondiale, qui 閠ait de 16 pour cent environ en 1992, va presque doubler pour atteindre 30 pour cent en 2020. Ce que montrent ces chiffres, entre autres choses, est l'acc閘閞ation du rythme de d関eloppement. Le niveau d'industrialisation que la Grande-Bretagne a mis 150 ans ?atteindre, et les Etats-Unis 100 ans, a 閠?atteint par les tigres asiatiques en moins d'une g閚閞ation, ce qui repr閟ente le processus de d関eloppement le plus rapide de l'histoire 閏onomique. Et cette dur閑 continue de s'amenuiser. Dix pays en d関eloppement, qui totalisent pr鑣 de 30 pour cent de la population mondiale, soit 1,5 milliard d'habitants, ont vu leur revenu moyen par habitant plus que doubler entre 1980 et 1995. Avec la diffusion des technologies de l'information, ce processus d'industrialisation est en passe de s'acc閘閞er et de s'閘argir encore davantage.
Un progr鑣 閏onomique et technologique aussi remarquable a un v閞itable impact sur la vie quotidienne des gens. Le PNUD nous rappelle que la pauvret?a recul?davantage au cours des 50 derni鑢es ann閑s qu'elle ne l'a fait au cours des cinq derniers si鑓les. Depuis 1960, les taux de mortalit?infantile ont 閠?presque r閐uits de moiti? Les taux de malnutrition ont diminu?de pr鑣 d'un tiers. D'ici ?la fin du si鑓le, on aura fait baisser de pr鑣 des deux cinqui鑝es l'analphab閠isme chez les adultes et 4 ? 5 milliards de personnes auront acc鑣 ?un enseignement 閘閙entaire et ?des soins de sant?de base. Fait encore plus notable, le PNUD 関oque la possibilit? d'閞adiquer la pauvret?mondiale au d閎ut du si鑓le prochain, une id閑 utopique il y a quelques d閏ennies encore, mais une r閑lle possibilit?aujourd'hui.
IV
L'OMC va et doit jouer un r鬺e de premier plan dans ce monde interconnect? Il existe un lien 関ident et indivisible entre la dynamique du progr鑣 technologique ? notre 閜oque et celle de la lib閞alisation de l'閏onomie mondiale et il appartiendra ? l'OMC, dans le cadre de son futur programme de travail, de pr閟erver ce lien. Il existe aussi une relation 関idente entre l'approfondissement de l'int間ration 閏onomique et technologique et la n閏essit?d'avoir des r鑗les globales pour g閞er notre interd閜endance, r鑗les que seul le syst鑝e commercial multilat閞al peut offrir. Le programme de la pr閟ente Conf閞ence 閚once plusieurs domaines dans lesquels les mutations 閏onomiques sont synonymes ?la fois de possibilit閟 nouvelles mais aussi de difficult閟 nouvelles. Permettez-moi maintenant de pr閟enter bri鑦ement de quelle mani鑢e le syst鑝e de l'OMC montre la voie.
G閞er la fronti鑢e technologique. En premier lieu, il y a les progr鑣 r閍lis閟 dans la lib閞alisation des nouveaux secteurs de l'閏onomie mondiale, qui contribuent ?閘argir et ?enrichir la circulation des technologies et de l'information dans le monde. Cette ann閑 seulement, nous sommes parvenus ?des accords pr関oyant la lib閞alisation ? l'閏helle mondiale des services de t閘閏ommunication et des produits des technologies de l'information, dont les 閏hanges 閝uivalent au commerce mondial de l'agriculture, de l'automobile et des textiles confondus. Il s'agit en fait d'un nouveau Cycle qui n'en a pas le nom. Mais, chose plus importante, un pas important a 閠?franchi pour faire entrer le commerce des produits de la technologie du si鑓le prochain dans un syst鑝e fond?sur des r鑗les et dot?des moyens de les faire respecter. Telle est la contribution que seule l'OMC peut faire ?une plus grande pr関isibilit?de l'関olution 閏onomique.
Mais la fronti鑢e technologique ne cesse d'avancer, ce qui fait peser des pressions nouvelles sur le syst鑝e des 閏hanges qui doit suivre le rythme. Dans un discours r閏ent, le Pr閟ident Clinton a souhait?la n間ociation d'une zone de libre-閏hange sur le r閟eau Internet. Une telle n間ociation serait une 閠ape importante dans nos discussions sur les questions commerciales ?inscrire ?l'ordre du jour pour le XXIe si鑓le et dans notre action pour 閘argir encore le mouvement mondial vers le libre-閏hange dans l'information. Cependant, si Internet offre une nouvelle fronti鑢e prometteuse et avantageuse o?les affaires pourront 阾re men閑s sur un r閟eau mondial continu de liaisons 閘ectroniques, il ne faut pas croire pour autant que les gouvernements n'ont pas de pr閛ccupations l間itimes ?faire valoir ni de responsabilit閟 ?assumer. Ces gouvernements ont leur mot ?dire dans ce domaine. Parmi les questions les plus importantes qu'ils doivent se poser au sujet du commerce 閘ectronique, on citera celles qui concernent le respect de la vie priv閑, la protection de la propri閠?intellectuelle, la politique fiscale et la r間lementation dict閑 par des consid閞ations d'int閞阾 g閚閞al. Mais il faudra bien faire la distinction entre l'intervention l間itime et les distorsions motiv閑s par le protectionnisme. Il faudra donc 閠udier soigneusement les implications du commerce 閘ectronique eu 間ard aux responsabilit閟 des pouvoirs publics.
A l'OMC, notre pr閛ccupation imm閐iate cette ann閑 est de faire aboutir au mois de d閏embre les n間ociations globales sur les services financiers. La lib閞alisation du secteur financier et la mise en place d'un syst鑝e financier mondial fort et stable sont les deux volets d'un m阭e diptyque. La lib閞alisation appelle l'investissement, lequel signifie un meilleur acc鑣 aux capitaux, aux connaissances et ?un r閟eau financier mondial interactif. Les engagements de lib閞aliser les services financiers dans le cadre de l'AGCS ne vont en aucune fa鏾n compromettre la facult?qu'ont les Membres de l'OMC d'appliquer de saines politiques macro-閏onomiques et de r間lementation. Au contraire, les engagements de lib閞aliser exigent l'adoption de telles politiques, qui sont la condition sine qua none d'une bonne sant?pour le secteur financier sain. Il est clair qu'on ne peut pas tout faire tout de suite. Et beaucoup de pays n'en sont qu'au d閎ut du processus de r閒orme interne. Mais la lib閞alisation des 閏hanges, avec des engagements ?terme, m阭e si dans certains cas leur ex閏ution doit 阾re 閏helonn閑, peut aider ?la mise en place d'un processus de r閒orme plus large, et lui donner une cr閐ibilit? essentielle ?son succ鑣 et sa stabilit?
Il y a un autre point ?ne pas perdre de vue au moment o?nous commencerons ?d閒inir le programme de lib閞alisation pour le si鑓le ?venir. Sans m閏onna顃re l'important potentiel qui s'offre pour le commerce sans fronti鑢es, nous ne devons pas oublier les nombreux domaines du commerce international o?les fronti鑢es ne sont que trop r閑lles, comme l'agriculture, les textiles ou les produits industriels, et les nombreux pays dont le bien-阾re 閏onomique d閜end d'une plus grande ouverture du commerce dans ces secteurs. Si nous ne sommes pas capables d'avancer en prenant en charge ?la fois les pr閛ccupations anciennes et les nouvelles, celles des pays en d関eloppement comme des pays d関elopp閟, nous risquons de voir se fragmenter l'閏onomie mondiale et se creuser encore l'閏art entre les pays "branch閟" sur la mondialisation et ceux qui restent en marge.
Int間rer les march閟 閙ergents - Espoirs et 閏ueils. Le deuxi鑝e 閘閙ent-cl?de l'ordre du jour de l'OMC est l'閘argissement de sa composition. Non seulement l'閏onomie sans fronti鑢es multiplie nos relations, elle les 閘argit aussi. Les liens se resserrent avec les pays en plein essor d'Asie, d'Am閞ique latine et maintenant d'Afrique, ce qui cr閑 d'immenses possibilit閟, mais 間alement d'閚ormes probl鑝es d'int間ration, d'ajustement et de stabilit? Votre document de conf閞ence fait valoir ?juste titre que la croissance future de la Chine, de l'Inde ou des pays du MERCOSUR d閜endra du maintien de la stabilit?閏onomique et politique et de la poursuite du processus de r閒orme. Tous ces pays sont aux prises avec d'importants probl鑝es d'ajustement 閏onomique et social. La modernisation de la Chine va n閏essiter ?elle seule des importations de mat閞iel et de technologie totalisant environ 100 milliards de dollars EU par an, et ses d閜enses d'infrastructure au cours des cinq derni鑢es ann閑s de la pr閟ente d閏ennie pourraient se chiffrer ?250 milliards de dollars EU. Pour la Chine et les 27 autres candidats, l'accession ?l'OMC est un 閘閙ent-cl?du processus de r閒orme interne, elle leur apporte la s閏urit? d'acc鑣 aux march閟 mondiaux, un syst鑝e de r鑗lement des diff閞ends obligatoire et un si鑗e autour de la table o?continuent ?s'閘aborer les r鑗les du commerce du XXIe si鑓le.
Aider ceux qui sont en marge de l'閏onomie mondiale. L'universalit?pr閟ente une autre dimension importante. Il s'agit de la n閏essit?de faire en sorte que chacun soit inclus dans la nouvelle 閏onomie dont le moteur est l'information, non seulement pour emp阠her les plus pauvres d'阾re encore plus marginalis閟, mais pour aider chacun de nous ? profiter des possibilit閟 qu'offre l'int間ration technologique et 閏onomique. Le passage qui s'op鑢e aujourd'hui de la production industrielle ?la production des connaissances exige des comp閠ences plus neuves et beaucoup plus pointues qu'il n'en a fallu au si鑓le dernier pour passer de la ferme ?l'atelier. Les gouvernements doivent donc trouver aussi des m閠hodes nouvelles pour relever le d閒i du d関eloppement, c'est-?dire ne pas se contenter d'investir dans l'industrie et les infrastructures, mais investir dans les gens.
Le mois prochain, l'OMC va tenir une R閡nion de haut niveau avec la CNUCED, le Centre du commerce international et les grandes institutions financi鑢es multilat閞ales afin d'閘aborer une nouvelle approche int間r閑 face au probl鑝e de la marginalisation des pays les moins avanc閟. L'un des objectifs vis閟, que l'OMC est pratiquement en passe d'atteindre, consiste ?faire un usage beaucoup plus large des nouvelles technologies pour donner une plus large diffusion et plus d'efficacit??l'assistance technique et ? l'information. L'objectif plus vaste consiste ?int間rer nos politiques et ?mobiliser nos efforts en faisant concorder l'assistance technique avec le renforcement des capacit閟 et l'acc鑣 aux march閟 pour 閘aborer une strat間ie concert閑 en faveur du d関eloppement.
V
L'approche du cinquanti鑝e anniversaire du syst鑝e multilat閞al nous offre la possibilit?d'阾re aussi inventifs pour b鈚ir cette 閏onomie de plus en plus globale et lib閞閑 des fronti鑢es que l'ont 閠?nos pr閐閏esseurs il y a un demi-si鑓le en construisant le syst鑝e international d'apr鑣 guerre. Voil?ce que signifie inventer l'avenir. On aurait tort de sous-estimer les nombreux probl鑝es li閟 aux structures et ?la concurrence qui se posent dans l'閏onomie mondiale actuelle. Il faut que les gouvernements et les institutions internationales s'y attaquent en coop閞ation.
On aurait tout aussi tort de m閏onna顃re le fait que, si les tendances actuelles se maintiennent, nous avons le potentiel de faire doubler les 閏hanges mondiaux en l'espace d'une d閏ennie et de doubler aussi la production et les ressources mondiales en l'espace de deux d閏ennies, avec un taux de croissance dans les pays en d関eloppement 間al au double de celui des pays avanc閟. Nous avons le potentiel pour cr閑r l'間alit? d'acc鑣 ?l'閐ucation et ?l'information, en particulier pour le monde en d関eloppement, ce qui ?son tour va cr閑r l'間alit?des chances. Et derri鑢e tout cela, il y a le potentiel que nous avons de surmonter les obstacles, non seulement de la g閛graphie, mais aussi ceux de la politique, de la richesse et du savoir, qui s閜arent depuis trop longtemps nos diff閞ents mondes. On n'a encore jamais vu se conjuguer autant de possibilit閟 qu'aujourd'hui o?l'閏onomie de march? dans toute sa diversit? domine l'関olution de toute l'閏onomie mondiale. Jamais auparavant une g閚閞ation n'avait d閠enu un plus grand pouvoir de cr閑r un monde meilleur.
Mais d閠enir un grand pouvoir de fa鏾nner l'avenir, c'est aussi assumer une grande responsabilit? Il nous manque un message clair nous indiquant quelles sont les grandes possibilit閟 de cette p閞iode de mutation, car le message qui domine aujourd'hui est trop 閠roitement ax?sur les difficult閟. Il faut renverser cette tendance. J'esp鑢e que le cinquanti鑝e anniversaire du syst鑝e commercial multilat閞al, qui sera marqu? par une c閘閎ration de haut niveau, au mois de mai prochain, ?Gen鑦e, nous offrira cette occasion. Faute de quoi, le prix ?payer sera un monde divis? Nous n'aurons pas une coop閞ation internationale fond閑 sur des r鑗les, mais une anarchie internationale ancr閑 sur la puissance. Nous n'inventerons pas l'avenir, mais nous retournerons au pass? avec ses conflits, ses divisions et ses trag閐ies. La voie que nous choisirons d閜endra de notre vision de l'avenir, mais aussi de la sagesse dont nous ferons preuve.
Le moment que nous vivons aujourd'hui n'est pas sans rappeler celui qu'a choisi Christophe Colomb il y a un demi-mill閚aire. Tout comme la conqu阾e des oc閍ns, au XVIIe si鑓le, a ouvert une p閞iode de d関eloppement rapide en Europe et dans le Nouveau Monde, je pense que notre toute derni鑢e conqu阾e sur la g閛graphie pourrait marquer le d閎ut d'une p閞iode de d関eloppement tout aussi dynamique pour le monde. Mais pour d閏ouvrir ce nouveau monde, il nous faudra trouver des moyens nouveaux pour canaliser nos 閚ergies collectives, et 阾re aussi visionnaires et aussi aventureux que les explorateurs intr閜ides qui ont ouvert les routes du commerce d'antan.